CONTEXTE ET PRÉSENTATION DU PROJET

 

 Depuis une décennie, la promotion du droit de la femme est une priorité de l’Etat Ivoirien qui a ratifié la CEDEF (Convention sur l'Élimination de toutes les formes de Discrimination à l’Égard des Femmes) et le protocole de MAPUTO (charte africaine des droits de l'Homme et des peuples). Cependant, les inégalités persistent et ont connu une explosion en période de la covid-19. Les cas de viol, de harcèlement sexuel, d’attentat à la pudeur, de déni de ressources, de violences conjugales, de violences morales et domestiques se sont accrus. En 2020, le Ministère de la Femme, de la Famille et de l’Enfant a enregistré 5000 cas relatifs aux violences basées sur le genre (VBG) contre 2744 cas en 2018. Malheureusement bon nombre de ces survivantes n’ont pas accès à la justice, et nombreux encore sont les cas non recensés. C’est dans cette dynamique que le RIDDEF, grâce à l’appui technique et financier de Carrefour International, a mis en œuvre ce projet de monitoring de la chaîne pénale. Réalisé dans le district d’Abidjan, ce projet couvre principalement 5 communes (Yopougon, Abobo, Port-Bouët, Bingerville et Cocody) pendant 6 mois. Le monitoring de la chaîne pénale vise à contribuer à un meilleur accès à la justice des survivantes de violence basée sur le genre âgées de 0 à 14 ans pour les filles/ garçons, de 15 à 24 ans pour les jeunes, les adultes de 25 ans et plus et les personnes vivant sous le seuil de pauvreté 145. Ce projet est divisé en 2 phases : une phase de collecte des données dans les différents points focaux et une phase de plaidoyer auprès des autorités administratives en vue d’un meilleur traitement de ces cas.

 

 

LES MOYENS DÉPLOYÉS ET LES RÉSULTATS OBSERVÉS

 

L'équipe a collecté des données auprès des commissariats, brigades, gendarmeries et autorités judiciaires et a également assisté à des audiences ainsi que mené des enquêtes de terrain auprès des victimes. Cela a permis non seulement l’amélioration des capacités de 8 agents issus des délégations du RIDDEF en matière de prise en charge et de suivi des cas de VBG, mais également de la publication d’un rapport à cet effet. Le lien ici

À l’issue de ces processus, des analyses qualitative et quantitative des données ont été effectuées, résultant à l'évaluation de 910 dossiers enregistrés sur la période de janvier 2021 à janvier 2022 (donnant la répartition suivante : Yopougon 349 (38%), Abobo 292 (32%), Port-Bouët 179 (20%), Bingerville 55 (6%), Cocody 35 (4%)).

Voici des chiffres clés de ces analyses :

  1. Types de VBG observés dans les différentes communes : ni de ressources 30%, violences domestiques 22%, viol 18%, violences physiques et morales 11%, autres 10%, attentat à la pudeur 6%, harcèlement 2%, mariage forcés 1%.

 

  1. Suite donnée aux dossiers enregistrés dans les commissariats et gendarmeries : La majeure partie des dossiers (65,71%) font l’objet de conciliation et de règlement à l’amiable. Seulement 11% sont transmis aux parquets, ce qui s’explique par le fait que certaines victimes ayant porté plainte reviennent les retirer pour des raisons telles que : la pression familiale, le regard de l’entourage, le sentiment de culpabilité.

 

  1. Suite donnée aux dossiers par les parquets : information judiciaire à 60, 41 % ; classés sans suite à 12,55%, citation directe à 13,71% ; flagrant délit à 13,32% ;

 

 

  1. Observation de 11 audiences résultant sur ces pourcentages d’infraction poursuivies : violence conjugale à 28%, autres types à 27%, attentat à la pudeur à 18%, coups et blessures à 18 % ; viol à 9%.

 

  1. Type d’audience : audiences publiques à 72,72%, audience à huis clos à 27, 27% avec 73% de présence des survivantes à l’audience et 27% d’absences. Également 64% des victimes qui ne sont pas assistées par un avocat et 36% qui le sont.

 

  1. Décision du juge : lors des onze 11 audiences, environ 73% des auteurs ont été déclarés coupable et 27% non coupables. Certaines décisions concernant les affaires de viol et de violences conjugales sont généralement concernées par cette décision.

 

  1. Enquête auprès des victimes : Selon les résultats de l’enquête, les violences se déroulent généralement au domicile des victimes 50% et dans leur quartiers 47%

 

  1. Niveau de satisfaction des victimes du traitement des plaintes : La majorité des victimes 63% sont satisfaites du traitement de leur plainte.

 

  1.  Prise en charge des survivantes par le RIDDEF : psychologiques 57% ; judiciaire 14% ; financier 29%. Pendant la phase de prise en charge, plusieurs victimes ont répondu présentes surtout les victimes de viol, de violences conjugales et de dénis de ressources.

 

 

DIFFICULTÉS RENCONTRÉES ET ENSEIGNEMENTS

 

La difficulté première survient avec la constatation que la plupart des dossiers pour les cas de viol sont en attente dû au fait de l’instruction de ces dossiers. La phase de l’instruction est une longue procédure qui en général ne soulage ni les victimes qui souhaitent que justice soit faite dans un délai bref, ni les auteurs qui pendant cette phase sont toujours en détention provisoire.

Il sera premièrement retenu de ce projet que de plus en plus de personnes sont promptes à aller dénoncer les VBG. Il y a également de plus en plus de points focaux qui sont dédiés à la prise en charge des cas de VBG, mais fort est de constater que ces points focaux ont besoin d’un renforcement de capacité. Nous préconisons alors pour une meilleure prise en charge d’améliorer la synergie d’action de tous les acteurs sur le terrain. Il faut également noter qu’en termes de statistique sur le traitement des VBG par la chaîne pénale, nous sommes les premiers en la matière, ce qui nécessite un élargissement du projet au niveau national.

 

 

UN PROJET INNOVANT

 

L’innovation de ce projet prend place dans l’étude des défis auxquels est exposée la chaîne pénale dans la gestion des plaintes de survivantes de VBG.

Ce projet a permis de révéler les difficultés que rencontrent les survivantes dans le processus de la gestion de leur dossier grâce à l’étude approfondie de la chaîne pénale.

 

 

Un projet mené par :

Coordinatrice du projet : Tra Lou Fidèle épouse Amoussou

Responsable du suivi budgétaire : M. Dje Eric Kouakou  

Équipe en charge de collecter les données : Mme Amoussou Fidèle, Blé Fabianie Valzere, Dropou Dan Ingrid, Yeo Adiarra, Boua Serge Alain, Mme Koffi Ghislaine, M. Tehua Stéphane, Fabouni Femi

 

 

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